Ressources agronomiques sur les productions végétales au Sénégal

Tomate - Guide du producteur
La Tomate sous abris
Gestion du personnel

En culture sous abris, la gestion du personnel est un facteur déterminant à l’obtention de rendements élevé. Ceci est particulièrement vrai pour la tomate où la différence de productivité entre les entreprises est le plus souvent liée à la qualité du travail de la plante. La main d’oeuvre est également la 1ère charge, représentant 30 à 40 % des charges de production, loin devant le coût des plants, des engrais ou des produits phytosanitaires. Une organisation performante est certainement la clef de la réussite de cette production.

Chlorose sur feuille

- Les principes d'une bonne organisation

Les ouvriers sont généralement répartis en 3 catégories :
– Les échassiers assurent l’épandage du composte, la pose des goutteurs et du paillage, le palissage, l’arrachage et le retrait des crochets ;
– Les équipes au sol posent les crochets, assure la plantation, réalisent la récolte et l’effeuillage et termine le cycle par le retrait des plantes et des crochets et le nettoyage des serres ;
– L’équipe phytosanitaire assure les traitements phytosanitaires, les lâchers d’auxiliaires, l’entretien des filets en cours de campagne et leur changement en inter-campagne tous les 3 ans.

Pour chaque catégorie, les lignes de culture sont attribuées pour toute la campagne, de la plantation à l’arrachage. Pour chaque ligne, l’on doit savoir à tout moment qui fait quoi. Les ouvriers doivent être incité à produire un travail déterminé avec une qualité d’exécution suffisante. Pour cela il est souhaitable de mettre en place une politique salariale incitative. Cela peut se faire en autorisant les ouvriers à quitter leur poste dès que leur travail est terminé et/ou en instaurant une prime à la qualité. Dans ce cas, les primes des chefs d’équipe et du responsable du personnel (coordinateur) sont déterminées en fonction de la somme des résultats individuels des ouvriers dont ils ont la charge. Ce système est efficace à condition de mettre en place une évaluation quantitative impartiale.

- Exemples d'organisation pour une exploitation de 12 ha

Le tableau suivant donne un exemple d’organisation pour une culture de tomate ronde pour les différentes opérations culturales. Les temps de travaux sont définis pour une journée de 7 heures de travail pour les ouvriers au sol et de 6 heures pour les échassiers. Une semaine de pratique est généralement suffisante pour acquérir le rythme de travail. La qualité de l’exécution des tâches dépendra en grande partie de la qualité de la formation reçue préalablement dans une serre dédiée à la formation. Une fois qu’un ouvrier a acquit un rythme de travail il est difficile de corriger les mauvaises habitudes. Dans tous les cas mieux vaut diminuer légèrement la tâche et exiger une très bonne qualit » de travail que l’inverse. La fréquence d’intervention des différentes opérations culturales tient compte des conditions climatiques de la région de St. Louis. Elle intègre un jour de repos par semaine. Chaque billon, numéroté avant la plantation, est attribué à un ouvrier pour le travail au sol (effeuillage, récolte, désherbage, nettoyage des pieds, etc. …), à un échassier pour le palissage et à un opérateur pour la défense des cultures (traitements phytosanitaires et lâché des auxiliaires). Pour les équipes au sol, la ferme est scindée en 6 ou 8 secteurs. Dans notre exemple 2 billons par secteur sont attribués à chaque ouvrier. Quatre secteurs sont récoltés successivement chaque jour. La journée se termine par l’effeuillage d’un secteur. Ainsi, dès que le 1er secteur est récolt, il est libéré pour un éventuel traitement phytosanitaire. Pour les échassiers, la ferme est scindée en 6 secteurs. Dans notre exemple 6 billons par secteur sont attribués à chaque échassier. Un secteur est palissé chaque jour. En début de cycle, la croissance des plantes étant supérieure à 30 cm / semaine, le 6ème secteur est palissé par une équipe au sol, afin de respecter un passage tous les 5 jours. Pour les opérateurs de défense des cultures, la ferme est scindée en 4 secteurs : 1 ha est attribué dans chaque secteur à 2 ouvriers.

Tableau 1 : Exemple d'organisation pour une ferme de 12 ha de tomate ronde récoltée en vrac

Situation Critères techniques Caractéristiques
Saint Louis Serre canarienne sous filets 20×10 Ferme de 12 ha Conduite de plante : palissée à 3 m Nombre de plants : 10  000 Nombre de bras : 20  000 Nombre de billons : 40 / ha x 12 = 480 Nombre de bras / billon : 500 Récolte : (200 t / ha x 12) / (5 * 24 j) = 20 t / j
Temps de travaux 1 Fréquence Billons / M.O. / jour Surface par jour
Equipe au sol Attribution de 2 billons / M.O. sur 8 x 1,5 ha 1 équipe de 30 M.O.
De la pose des crochets au 1er palissage
Pose crochets 1000 crochets / M.O. 1 fois 8 jours 2 billons 1,5 ha
Plantation 1000 plants / M.O. 1 fois 4 jours 4 billons en 3 h 3 ha
Noeud 2 000 bras / M.O. 1 fois 4 jours 4 billons 3 ha
1er ébourgeonnage 2 000 bras / M.O. 1 fois 4 jours 4 billons 3 ha
1er palissage 2 000 bras / M.O. 1 fois 4 jours 4 billons 3 ha
Avant l’entrée en production
Palissage 2 ha jusqu’à 2 m 3 000 bras / M.O. tous les 5 jours 6 billons 2 ha à 13 M.O.
Effeuillage / nettoyage pieds 3 000 bras / M.O. tous les 12 jours 6 billons 2 ha à 13 M.O.
Vibrage 12 000 bras/ M.O. tous les 3 jours 4 ha à 6 M.O.
Ratissage, désherbage, … 2 ha à 13 M.O.
Equipe au sol en période de récolte
Récolte tomate vrac 130 kg / h tous les 2 à 3 jours 8 billons en 5 h 6 ha
Effeuillage 1 000 bras / M.O. tous les 12 jours 2 billons en 3 h 1,5 ha x 8 jours
Nettoyage pieds, désherbage, … Au besoin 2 à 3 ha
Fin de cycle
Retrait des plantes (partie haute) 1 000 plantes / M.O. 1 fois en 8 jours 2 billons 1,5 ha
Retrait crochets (+ échassiers) 20 000 crochets / M.O. 1 fois en 1 jour 40 billons 12 ha
1er nettoyage 1 fois en 4 jours 4 billons 3 ha
2ème nettoyage + désherbage 1 fois en 4 jours 4 billons 3 ha
Echassiers Attribution de 6 billons / M.O. sur 6 x 2 ha 1 équipe de 13 M.O.
Période de palissage
Palissage 10 ha jusqu’à 2 m 3 000 bras / M.O. tous les 5 jours 6 billons 2 ha
Palissage 12 ha sur échasses 3 000 bras / M.O. tous les 6 jours 6 billons 2 ha
Fin de cycle
Retrait ficelle bas de la plante 1 000 bras / M.O. 1 fois 18 jours 2 billons 0,7 ha
Arrachage 4 500 plantes / M.O. 1 fois 2 jours 18 billons 6 ha
Chargement des plantes 1 fois en 4 jours 3 ha
Retrait + chargement des tiges 3 000 plantes / M.O. 1 fois en 6 jours 6 billons 2 ha
Retrait crochets 20 000 crochets / M.O. 1 fois en 1 jour 40 billons 12 ha
Retrait du paillage + goutteurs 1 fois en 6 jours 6 billons 2 ha
Equipe phytosanitaire Attribution de 4 ha / 2 M.O. sur 4 x 3 ha 3 équipes de 2 M.O.
Traitements à la lance 6 M.O. en 1h30 Selon besoins 3 ha
Traitements localisés Selon besoins 1,5 à 3 ha
Entretien des filets tous les 15 jours
Elimination des plants virosés Début de culture 6 ha
Autre
Manutention récolte 2 M.O. 6 ha
Irrigation 2 M.O.

1 M.O. : Unité de travail = 1 journée d’un ouvrier

 

L’organisation du travail est à adapter en fonction du type de tomate. En effet, à chaque type correspond des temps de travaux différents. La récolte est le poste qui présente les plus grandes variations :
– tomate grappe : 150 kg/h (120 à 180)
– tomate ronde : 130 kg/h (100 à 150)
– tomate cocktail : 35 kg/h (25 à 50)
– tomate cerise vrac : 10 kg/h (7 à 15)
Le tableau suivant est un exemple d’organisation pour une culture de tomate cerise récoltée en vrac, la culture la plus exigeante en main-d’oeuvre.

Tableau 2 : Exemple d'organisation pour une ferme de 12 ha de tomate cerise

SituationCritères techniquesCaractéristiques
Saint Louis
Serre canarienne sous filets 20×10
Ferme de 12 ha
Conduite de plante : palissée à 3 m
Nombre de plants : 22 000
Nombre de bras : 44 000
Nombre de billons : 40
/ ha x 12 = 480
Nombre de bras / billon : 1 100
Récolte : (100 t / ha x 12) / (5 * 24 j) = 10 t / j
 Temps de travaux 1FréquenceBillons / M.O.Surface par jour
Equipe au solAttribution de 1 billon / M.O. sur 8 x 1,5
ha
2 équipes de 30 M.O.
De la pose des
crochets au 1er palissage
 
Pose crochets1 100 crochets / M.O.1 fois 8 jours1 billon / M.O. / jour1,5 ha
Plantation1 100 plants / M.O.1 fois 4 jours2 billons / M.O. en 3 h3 ha
Noeud2 200 bras / M.O.1 fois 4 jours2 billons3 ha
1er ébourgeonnage2 200 bras / M.O.1 fois 4 jours2 billons3 ha
1er palissage2 200 bras / M.O.1 fois 4 jours2 billons3 ha
Avant l’entrée en production   
Palissage 2 ha jusqu’à 2 m3 300 bras / M.O.tous les 5 jours3 billons2 ha à 27 M.O.
Effeuillage / nettoyage pieds3 300 bras / M.O.tous les 12 jours3 billons2 ha à 27 M.O.
Vibrage12 000 bras / M.O.tous les 3 jours 4 ha à 12 M.O.
Ratissage, désherbage, …   2 ha à 27 M.O.
Fin de cycle 
Retrait des plantes (partie haute)1 100 plantes / M.O.1 fois en 8 jours1 billons1,5 ha
Retrait crochets (+ échassiers)22 000 crochets / M.O.1 fois en 1 jour20 billons12 ha
1er nettoyage 1 fois en 2 jours2 billons6 ha
2ème nettoyage + désherbage 1 fois en 2 jours2 billons6 ha
Equipe au solAttribution de 0,5 billon / M.O. sur 6 x 2
ha
4 équipes de 40 M.O.
Période de récolte  
Récolte T. cerise vrac9 kg / htous les 2 à 3 jours1,5 billons en 6 h 306 ha
Effeuillage550 bras / M.O.tous les 12 jours0,5 billons en 1 h 301,5 ha x 8 jours
Nettoyage pieds, désherbage, … Au besoin 2 à 3 ha
EchassiersAttribution de 3 billons / M.O. sur 6 x 2
ha
1 équipe de 27 M.O.
Période de
palissage
 
Palissage 8 ha jusqu’à 2 m3 300 bras / M.O.tous les 5 jours3 billons2 ha
Palissage 12 ha sur échasses3 300 bras / M.O.tous les 6 jours3 billons2 ha
Fin de cycle 
Retrait ficelle bas de la plante1 100 bras / M.O.1 fois 18 jours1 billons0,7 ha
Arrachage4 950 plantes / M.O.1 fois 2 jours9 billons6 ha
Chargement des plantes 1 fois en 4 jours 3 ha
Retrait + chargement des tiges3 300 plantes / M.O.1 fois en 6 jours3 billons2 ha
Retrait crochets22 000 crochets / M.O.1 fois en 1 jour20 billons12 ha
Retrait du paillage + goutteurs 1 fois en 3 jours6 billons4 ha

1 M.O. : Unité de travail = 1 journée d’un ouvrier

- Les différentes opérations culturales
    • La plantation
  • Les plants à 2 bras sont placés perpendiculairement au billon sans que le collet entre en contact avec le sol. Les mottes sont enterrées au raz du sommet et fermement tassées. L’irrigation est maintenue 1 à 2 h après plantation.

      • Le palissage

    Les premières opérations interviennent 8 jours après la plantation. Lors du 1er palissage, la ficelle ne doit pas être trop serrer la base du plant. Au 2ème passage, les ficelles des 2 bras sont reliées ensemble par un noeud. Pour les plants à 1 bras, la ficelle est enterrée à l’aide d’une tige de fer. Ebourgeonnage et palissage interviennent ensuite à raison d’un passage tous les 5 jours jusqu’à ce que les plantes soient chargées en fruits (stade F6 / F7), puis tous les 6 jours, voir plus en plein hiver pour respecter une croissance d’environ 20 cm entre 2 interventions. L’ébourgeonnage est réalisé sans laissé de chicot, sur des bourgeons d’une longueur inférieur à 10 cm. Le palissage consiste à effectuer un tour de ficelle entre 2 feuilles ou à poser un clips en plastique toutes les 3 feuilles, en dessous d’une feuille ou d’un bouquet (jamais au dessus). Lorsque les plantes atteignent le fil de fer, la descente est réalisée en même temps que le palissage généralement à raison d’un passage sur 2 soit tous les 12 jours. Elles sont descendus et décalées vers la droite selon un carré de 40 cm de côté environ. Chaque tête doit rester à la même hauteur et équidistante tout au long de la campagne. Les échassiers utilisent des échasses DURA-STILTS de 1,70 m de haut pour un palissage à 3,50 m de haut, équipées de rallonges de 1,50 m de long en acier inoxydable. Toutes les opérations sont réalisées manuellement en se désinfectant les mains à chaque changement de billon.

      • Effeuillage

    L’effeuillage consiste à supprimer 3 à 6 feuilles à chaque passage afin de maintenir 12 à 14 feuilles par bras en hivers et 15 à 17 feuilles le reste de l’année. La feuille est retirée manuellement en la sectionnant au point d’abscission, sans laisser de chicot.

      • Récolte

    La récolte est réalisée tous les 3 jours en hivers et tous les 2 jours le reste de l’année, afin d’obtenir un stade de maturité homogène. Ce stade est défini sur une échelle colorimètrique. En France, le CTIFL la définie sur une plage de 1 à 12, du vert foncé au rouge vif. Pour la tomate individuelle, le stade de récolte le plus fréquent au Sénégal est 5 à 6, afin que le produit supporte une dizaine de jours de transport. Pour la tomate grappe, la récolte intervient généralement au stade 5 du dernier fruit conservé sur la rafle. Le respect du stade de récolte par l’ensemble des ouvriers est d’un des points clef de la réussite d’une culture de tomate. Toutes les opérations sont réalisées manuellement en se désinfectant les mains à chaque changement de billon.

      • Traitements phytosanitaires

    De nombreux facteurs entre en jeux pour réussir l’application d’un produit phytosanitaire. Le produit doit être appliqué sur la totalité de la face inférieure des feuilles, zone de développement des insectes et les champignons. Pour un traitement à la lance, outre le choix d’une buse de petit diamètre afin d’augmenter le nombre d’impactes / cm², il convient d’orienter les buses à environ 45° vers le haut, en réalisant un mouvement du bas vers le haut.

     
    - L'évaluation du personnel

    L’échelle d’évaluation ne doit pas comporter plus de 3 ou 4 niveaux. Le tableau suivant donne un exemple de critères à retenir et d’échelle de notation. La notation, réalisée 1 fois par semaine, est prise en compte en fin de quinzaine pour motiver ou sanctionner le personnel.

    Tableau 3 : Exemple d'évaluation du personnel pour une culture de tomate ronde

    Consigne Echantillon Bien Correcte Insuffisant
    Plantation
    Respect de la profondeur de plantation 2 x 1/2 billon > 90 % 80 à 90 % < 80 %
    Tassement du sol autour de la motte 2 x 1/2 billon > 90 % 80 à 90 % < 80 %
    Récolte / effeuillage
    Respect de la consigne de coloration 2 x 1 caisse > 90 % 80 à 90 % < 80 %
    Respect du nombre de feuilles effeuillées 2 x 1/2 billon > 90 % 80 à 90 % < 80 %
    Palissage de 500 bras / billon
    Bras par ligne 2 x 1/2 billon > 490 bras 480 à 490 < 480
    Bras palissés correctement 2 x 1/2 billon > 90 % 80 à 90 % < 80 %
    Traitements phytosanitaires
    Efficacité des traitements généralisés 8 x 1/2 billons > 90 % 80 à 90 % < 80 %
    Efficacité des traitements localisés 8 x 1/2 billons > 90 % 80 à 90 % < 80 %
    - Quelques aspects sociaux

    Dans tous les pays en développement, la qualité du travail des ouvriers dépend en partie de leur milieu d’origine. Généralement, des villageois pratiquant les cultures vivrières sont plus aptes à travailler dans des serres que ceux pratiquant l’élevage ou le commerce ou que les habitants des villes. Au Sénégal, il est reconnu que les habitants du sud, en particulier les Diolas, sont plus travailleur que les habitants du nord, comme les Peulhs ou les Maures. D’autre part, la quasi totalité des employés d’un village peuvent s’absenter plusieurs journées à l’occasion d’un deuil, d’un mariage ou d’une fête religieuse. Par conséquent, quelques règles en matière de gestion du personnel s’imposent au niveau de chaque ferme :
    – diversifier les origines, en limitant par exemple à 20 personnes le nombre d’employés par village ;
    – prévoir de loger sur place une vingtaine de célibataire en provenance par exemple de la Casamance qui pourront travailler les jours de fête religieuse ;
    – faire en sorte que le coordinateur et le pointeur / magasinier ne soient pas originaire d’un village proche de la ferme ;
    – mélanger les origines dans les équipes et vérifier que les liens familiaux n’influence pas les décisions de l’encadrement intermédiaire ;

    Le transport du personnel est une charge très lourde, pouvant représenter 30 % du salaire d’un ouvrier. Le choix d’un site de production doit donc non seulement prendre en considération la quantité et la qualité de la main d’oeuvre disponible mais aussi les moyens de transport à mettre en oeuvre.

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